vendredi 14 octobre 2011

Prospectus de l'Histoire des plantes de Dauphiné, par Dominique Villars, 1779

L'histoire de Dominique Villars est celle du fils de modestes paysans des Hautes-Alpes, né en 1745, qui, par sa ténacité, quelques rencontres déterminantes et une passion exclusive pour la botanique, a réussi à se hisser hors de son milieu d'origine pour devenir un des grands botanistes du Dauphiné (Stendhal l'a eu comme professeur. Un peu bourgeois dans ses jugements, il le qualifie de "paysan des Hautes-Alpes" !)


Il est surtout l'auteur de la première flore du Dauphiné, une des flores les plus riches de France par la variété géographique de la province où l'on trouve aussi bien la flore méditerranéenne, la flore continentale que la flore de montagne.

Grâce au soutien de l'intendant du Dauphiné, Pajot de Marcheval, Dominique Villars est d'abord admis comme élève à l'hôpital de Grenoble dans le début des années 1770. Il avait déjà herborisé dans le Dauphiné, essentiellement dans les Hautes-Alpes, avec son ami l'abbé Dominique Chaix. Les années 1770 seront l'occasion pour lui d'étendre son périmètre d'action, en parcourant toute la région. Il accompagne le naturaliste Guettard en 1775. Il rencontre des botanistes du sud de la France (Nîmes, Montpellier, etc). Il passe une année à Paris, en 1777, où il rencontre de nombreux savants, dont les Jussieu, Daubenton, etc. En 1778, il obtient son grade de médecin à l'université de Valence.

Le résultat de ses observations sur le terrain, amassées lors de ses herborisations, et un savoir consolidé par ses études et ses rencontres lui permettent d'envisager à la fin des années 1770 de doter le Dauphiné d'une flore régionale, comme en possèdent déjà de nombreuses autres régions de France. C'est un travail colossal pour un seul homme, obligé en même temps de travailler pour nourrir sa famille.

En 1779, il annonce la parution prochaine de cette flore, qu'il appelle assez curieusement Histoire des plantes de Dauphiné, dans un opuscule de 57 pages, véritable petit ouvrage de botanique :
Prospectus de l'histoire des plantes de Dauphiné et d'une nouvelle méthode de botanique, suivi d'un catalogue des plantes qui y ont été nouvellement découvertes, & de celles qui sont les plus rares, ou qui sont particulieres à cette Province. Avec leurs caractères spécifiques, & l'établissement d'un nouveau genre, appellé BERARDIA
Grenoble, Imprimerie Royale, 1779, in-8°, 57 pp. (dernière page chiffrée par erreur 49), une planche gravée dépliante hors texte.


Le terme Prospectus ne doit pas nous tromper. Il s'agit bien d'un livre, certes modeste par la taille, mais qui est suffisamment complet pour donner une idée précise de l'ouvrage à venir. Pour en savoir plus, cliquez-ici.

Il faudra néanmoins attendre 7 ans pour que paraisse le premier des 3 tomes de l'Histoire des plantes de Dauphiné. Il sera publié par l'auteur, à ses frais, en 1786. Le 3e tome paraîtra en 1789.

Ce Prospectus est d'abord l'occasion d'annoncer une nouvelle méthode de classification des plantes. Si ce sujet ne fait plus débat aujourd'hui, il faut savoir qu'à cette époque, les discussions étaient vives autour de ces méthodes de classification, au moment où le monde savant découvrait et commençait à appliquer la méthode linnéenne. En annonçant sa propre méthode, Dominique Villars voulait probablement "tester" l'accueil qui lui serait fait. Il n'a pas dû être mal reçu, car il l'appliquera dans son ouvrage, malgré les quelques réserves des botanistes qu'il a consultés.

L'autre objet de ce Prospectus est d'annoncer la découverte d'une nouvelle plante, la Bérardie (Berardia subacaulis). Il l'a décrit largement et l'illustre par une planche.


Cette planche est aussi l'occasion de présenter la future illustration de son ouvrage. Elle sera reprise telle quelle, parmi les 54 planches de son Histoire des plantes de Dauphiné.

Quant à la Bérardie, aussi appelée Bérardie laineuse, elle vit dans les zones montagneuses sèches, entre 1500 et 3100 mètres. On la trouve dans les éboulis calcaires et schisteux.
Ces photos vous permettront de découvrir cette plante "rustique", curieusement qualifiée de "prestigieuse" dans les notices Internet que j'ai trouvées.




Pour finir, remarquons que le nom de l'auteur est orthographié Villar, sans "s". C'est suite à une erreur typographique, jamais corrigée par l'auteur lui-même, que l'orthographe Villars a prévalu. Pour ceux que cela intéresse, je peux leur fournir une bibliographie de la grave question : Faut-il écire Villars avec ou sans "s" ? Le Bibliophile dauphinois étant toujours sérieux, il ne plaisante pas : il y a au moins 10 ouvrages ou articles où cette question est abordée. La famille Gauthier-Villars a failli traîner en justice un brave érudit haut-alpin qui avait osé militer (le rustre !) pour l'orthographe Villar (les Gauthier-Villars sont des descendants du botaniste).

2 commentaires:

LEMERCIER a dit…

Bonjour, je possède un portrait qui ressemble beaucoup a ce personnage, avec le titre en main de "botanographe"....serait ce possible ?
cORDIALEMENT

Jean-Marc Barféty a dit…

Bonjour.
Pour se faire une idée plus précise, il faudrait voir ce portrait. Si vous en avez une photo, vous pouvez me l'envoyer à cette adresse : bibliotheque.dauphinoise@numericable.fr
Cordialement